Un autre printemps



Istanbul - Turquie
Ed Tullett - Silver dive
Lecture : Orhan Pamuk - Istanbul



La Ville... 

Soirée où les jeunes se réunissent au pied de Galata Tower
Après avoir cru que je pouvais difficilement être impressionné, voilà qu'Istanbul me dévoile tous ses attouts pour m'en faire voir de toutes les couleurs. Istanbul, métropole multiculturelle à cheval entre l'Europe et l'Asie, capitale européenne de la culture en 2010, est aussi riche de merveilles que d'histoire. J'ai aimé la ville dès que je suis sorti de l'aéroport. Les grands espaces verts me manquaient. Et j'arrive en Turquie en plein printemps, pendant le festival de la Tulipe et tous les pommiers qui sont en fleurs. Les couleurs et les odeurs se donnent en spectacle.

Après la course au printemps Arabe, c'est donc un tout autre printemps que je m'apprête à vivre ici. Un printemps de renaissance, de verdure, d'air frais.

Mosquée Suleyman au coucher de soleil
Je sais, je reviens dans ma zone de confort. les prochaines semaines vont être faciles. J'ai vécu un petit choc, à Istanbul. Comme un choc de retour. Je commence rapidement à revenir en Occident. Il y a 4 Starbucks entre ma station de métro et mon hôtel, et je trouve ça difficile à accepter... Et en même temps, ça me conforte, je le sais. J'en viens à analyser ce qui me séduit autant d'Istanbul, et je réalise que c'est justement cette occidentalité qui commençait à me manquer. Pas tant les Starbucks, mais les grands parcs, la propreté des rues, l'efficacité des transports, le respect des piétons. Ne plus me faire dévisager, pointer du doigts ou harceler dans la rue. Home Sickness? Je me déçois un peu de m'être laisser charmer par la facilité retrouvée. Mais bon, j'assume... Je retourne petit à petit dans mes repères. Mon retour à Montréal est tout près...

Les jardins près du palais Topkapi
Le pont sur le Bosphore, reliant l'Asie à l'Europe
«  Celui qui se connaît lui-même et 
les autres reconnaîtra aussi ceci :  
l'Orient et l'Occident ne peuvent plus 
être séparés

- Johann Von Goethe

Vue de la New Mosque depuis le Galata bridge
C'est une ville magnifique Istanbul, je vous l'ai dit? J'ai pu apprendre sur les Byzantins et les Ottomans tout en me gavant de chefs d'oeuvres d'architecture comme Aghia Sofia et Sultanhamet's Mosque, la mosquée bleue. C'est malheureusement aussi envahi de touristes, chose à laquelle je n'étais plus habitué. Ça fait que je passe à nouveau inaperçu, chose que j'apprécie. Mais aussi que je dois faire une file incroyablement longue avant d'entrer dans les musées, qui sont bondés une fois à l'intérieur.

Le soir, on retrouve une vie active, très tard. Au pied de Galata tower, les jeunes boivent leur bière canette dans la rue, ils parlent, ils jouent de la musique. Il y a des jongleurs, toutes sortes de gens. C'est beau de simplicité.

Nous avons aussi pu visiter un paquet d'expositions d'arts, classique ou contemporain, de calligraphies islamiques, d'histoire... Istanbul mérite amplement son statut de capitale européenne de la culture. Je suis allé visiter le musée de l'archéologie, son immense collection qui nécessite une journée à elle seule, proposant des pièces des empires Byzantins, Perses, Ottomans, Grecs, Romains, des pièces du néolitihique, le cerceuil d'Alexandre le Grand et les premiers balbutiements de l'écriture cunéiforme. Et c'est intéressant de voir ce qui revient et ce qui change d'un musée à l'autre, d'un pays à l'autre. J'ai seulement encore plus envie de me plonger dans des livres d'histoire des civilisations. J'étais même frustré de réaliser à quel point mon apprentissage de l'histoire a été bâclé, oubliant d'immenses empires sous prétexte qu'ils ne font pas partie de "notre" histoire. Parce qu'on réalise à quel point tout s'entremêle, tout s'influence. Il n'existe pas des histoires, mais une Histoire, plastique, mobile, continuellement changeante, transformant ses acteurs et transformée par eux-mêmes, et c'est magnifique de ne pas seulement connaître notre partie histoire, mais l'Histoire, et d'essayer de la comprendre. Comprendre ce qui est sous-jacent à la culture, ce qui sous-tend nos façons de penser. C'est un rêve utopique. Le savoir universel n'existe plus. Mais plus j'en découvre, plus j'ai soif de savoir.

Une manifestation? Déferlement de passants sur Isklal Cad
Istanbul est un endroit merveilleux pour comprendre cette unicité de l'Histoire, cette interrelation continuelle. Au coeur des routes commerciales, au coeur des grands empires, qu'on l'appelle Byzanthe, Constantinople ou Istanbul, elle a été un témoin indéniable de l'Histoire.

Vue sur Beyoglu et Karakoy à partir du Bosphore
Petite tache sur l'amour que je lui porte, je dois avouer qu'il peut être difficile de trouver le vrai Istanbul sous ses apparâts pour touristes. Je disais que je la trouvais très occidentale, et pourtant, pour les

Européens, Istanbul est une porte sur l'Orient, une destination exotique accessible. Et on dirait parfois qu'elle se porte garante de la culture orientale pour plaire à cette soif d'exotisme, tout en restant agréablement Européenne pour ne pas être insécurisante. La sheesha, par exemple... Alors qu'en Égypte, elle était fumée partout, par le vieux commerçant devant la porte de son marché, ici je l'ai trouvée partout où il y avait des touristes, mais rarement dans les villages.

Mais bon. Quel est le vrai Istanbul? J'imagine que c'est tout ça, incluant l'apparât à touristes. Tout comme le plateau Mont-Royal et le Vieux Montréal sont autant de "Vrais" Montréal que l'est Hochelaga-Maisonneuve...






... Et la nature
Eddie Vedder - Guaranteed (Je n'avais pas le choix!)
Je suis finalement allé rejoindre Mathieu à Egirdir où nous partions pour 7 jours de randonnée dans les montagnes du cenre de la Turquie.

... Et ça à été une semaine complètement cinglée.

Les beautés ne se comparent pas. Mais souvent, j'aurais aimé utiliser quelques superlatifs pour tous les paysages qui nous entouraient. La Turquie est un peu négligée comme territoire de trek, mais j'ai envie de vous convaincre que vos jambes y trouveront leur bonheur!

"Leave it to me as I find a way to be

Consider me a satellite, forever orbiting
I knew all the rules, but the rules did not know me
Guaranteed"
- Eddie Vedder



Entre ciel et terre
De l'eau dans les bottes, de la boue jusqu'aux genoux et de la neige jusqu'aux hanches, on à été gâtés. Il a évidemment plu pour inaugurer notre marcher et s'assurer qu'on aie les pieds bien humides pour le reste de notre marche. Mais une randonnée n'en et pas une sans les caprices usuels de miss météo, et notre moral d'homme des bois est inébranlable. Et avec notre orgueil combiné, un ouragan ne nous aurait pas fait virer de bord!

La maison de Cesaye, à travers les pommiers en fleurs
C'était merveilleux, comme marche, et un merveilleux défi. Le lac bleu turquoise entouré de montagnes aux sommets blancs nous donnait dès la première journée une bonne impression de l'ampleur de la beauté des paysages que nous rencontrerions. Mais jamais on ne pouvait prévoir aussi beau. Et surtout, jamais on n'aurait pu imaginer toutes les expériences que cette randonnée nous a apporté.

La traversée des cols enneigés 
En 2 semaines, je n'ai pas compris la Turquie. Je n'ai pas vu la côte Sud, je n'ai pas vu Troie, ni la Cappadocie. Je connais moins de 10 mots en Turc, et encore. Mais j'ai eu des contacts humains incroyables qui m'ont fait renouer avec la générosité humaine, et j'ai été bouleversé par la beauté humaine de ce qu'on a vécu. Demandez à Mathieu, qui me voyait pendant que je fixais le plafond, incapable de dormir, essayant de comprendre tout ce qui nous arrivait.

Notre campement sur le bord du lac
Notre randonnée nous faisait passer à travers les cols enneigés, la grande paix blanche, les pics rocheux et les vallées de forêts. Des paysages magnifiques entourés d'arbres en fleurs qui me rappellent les plus belles peintures de ma grand-mère. Mais elle nous faisait aussi traverser les villages où nous étions accueilli avec la plus grande chaleur et un humanisme incroyable. Nous nous sommes fait offrir le divan d'un famille avec qui nous avons partagé le dîner, chez Cesaye. Nous avons pris une bière avec Mostafa avant qu'il nous fasse traverser le lac sur son bateau de pêche. Puis, nous voyant malmenés par le vent sur la plage à essayer de partir un feu, Tikili nous a fait venir un souper chaud qu'il a partagé avec nous avant de nous laisser tous les
restants pour le lendemain, sans demander une cenne. Le lendemain, c'est ensuite Yaçar qui, en nous pointant le bon chemin, nous a offert 2 pommes. Puis, on s'est fait inviter dans un festival de poisson, à la fin d'une exténuante journée de marche entre ciel et terre, où on nous a gavé gratuitement pour souper. En repartant le lendemain, un villageois nous a courru après, simplement pour nous donner un gros sac de pommes et repartir dans l'autre direction avant qu'on aie pu dire merci.
Conditions pas toujours idéales
À Eyupler, que le guide décrivait pourtant comme une ville froide et inhospitalière, on a simplement vécu un choc social. Mes barrières tombaient, je ne comprenais plus rien, de toute cette gentillesse gratuite. C'est perturbant, je vous jure...

Le bateau de pêcheur de Mostafa
Notre tente en coton au milieu de la neige
On s'est fait accueillir comme des enfants prodiges. On nous a offert du thé, chaque fois en refusant qu'on débourse quoi que ce soit. Les gens parlaient trois mots d'anglais, nous parlions 3 mots de Turc, et c'était suffisant pour que le contact soit des plus chaleureux. On nous a offert une place où dormir pour presque rien. On venait cogner à notre porte pour jaser avec quelques mots, parfois en language des signes. On nous a fait faire le tour du village, pour être sûr qu'on rencontre tout le monde et que tout le monde nous soit chaleureux. Un vieil homme qui avait travaillé en France nous gratifia d'un grand bonjour, avant de nous inviter pour un café. On est tombé sur l'imam, un jeune qui avait étudié les religions et la philo aux UK et qui nous traduisait les conversations dans un très bon Anglais. On nous a invité à participer à un grand buffet organisé pour le décès d'un villageois. On pensait qu'on ne serait pas à notre place... On a été accueillis à

bras ouverts avant de se faire offrir sans hésiter une place à table pour partager le repas, toujours sans débourser quoi que ce soit. On a participé à la prière après le repas. Puis on nous a demandé si on aimerait participer à la prière du soir, à la Mosquée, pour voir ce que c'est; Les non-musulmans ne sont jamais admis dans les mosquées pendant les heures de prières... ça vous donne une idée de l'accueil qu'on nous a porté. On a fini la soirée à discuter religions, philo, christianisme, islam et athéisme avec le jeune imam. J'ai eu de la misère à m'endormir ce soir là, car je ne comprenais pas ce qui venait de se passer. Ça bouleversait ce que je croyais connaître du monde, de cette difficulté maladive qu'on a à faire confiance à qui que ce soit...

C'était une expérience merveilleuse. On rêvait aux marques qui tracaient notre chemin et qui nous ont donné du fil à retordre. On s'est retrouvés sur des sentiers rocheux qui ressemblaient plus à de l'escalade que de la randonnées, sur des parois qui donnaient des vues imprenables sur le lac. On a perdu nos traces dans la neige, le brouillard, les forêts. On s'est poussés à bout. Et c'était merveilleux. Je ne me suis jamais senti aussi vivant. Et Mathieu dirait "Et on n'a jamais été aussi morts!".

Je parlais avec lui, à la fin d'une journée, sur le fait qu'il m'arrive souvent de réfléchir à comment je pourrais décrire ce que je vivais dans mon blog. Parce que trouver la meilleure façon de vous faire part de ce que je vis, c'est toujours difficile. Mais j'adore écrire, et penser à comment je vais écrire remplis mon besoin de générativité, de créativité, mon besoin de "produire" quelque chose. Et aussi ça matérialise les rêves que je suis en train de vivre. Et je discutais de tout ça avec Mathieu.
"- Mais peut-être qu'il y a des rêves qu'on ne pourra jamais matérialiser par écrit..."


On se retourne tous les deux, on regarde le paysage, les sommets enneigés, le lac, le soleil de fin d'après-midi, grisés par l'endorphine de cette longue journée de marche.

"- Ouais. C'est vraiment un foutu beau rêve..." 





















Commentaires

  1. Je corrobore tout. Sauf que le cercueil d'Alexandre le Grand n'est pas au musée d'archéologie d'Istanbul. Ça s'appelle le cercueil d'Alexandre parce qu'il y a des images des combats d'Alexandre sculptés dessus. C'est vrai par contre que les archéologues pensaient que c'étaient celui d'Alexandre le Grand quand ils l'ont trouvé. Il faut lire les pancartes dans les musées...

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