Tunisie 2 - Parce que vous méritez mieux!
Tunis
Rise Against - Swing Life Away (on sort les classiques de voyage!)
Lecture: Yasmina Khadra - Ce que le jour doit à la nuit
Rappelez-moi de ne plus écrire de mise à jour à 3h du matin. Vous méritez mieux que ça! J'étais pressé, fatigué, et sur mon départ, et je n'ai laissé paraître que quelque bribes de ce qu'était vraiment mon passage en Tunisie! Alors je vous réécris plus tôt que prévu, conscient que je vous ai laissé sur votre faim...
Alors me voilà de retour à Tunis après avoir visité un peu le sud, à quelques heures de mon départ vers le nord. J'ai pris une douche, chose que je n'avais pas fais depuis une semaine. J'ai recousu mes éternels jeans, qui commençaient à outrageusement laisser montrer mes fesses. Mes talents de couture et mon cours d'économie familiale étant loin, ça risque d'être à refaire dans quelques jours. À moins que je me laisse tenter par un jeans à 10$ dans les soukhs... À suivre.
Djerba |
Je suis allé visiter la plage et le port, avec ses piles de vases en terres cuites qui servent à la pêche à la poulpe traditionelle. Je suis passé devant un bateau qui offrait de nous amené au large pour pas cher dans la journée, avec le déjeuner inclus, alors je sautai sur l'occasion.
Houlà.
Me v'la sur un bateau de pirate avec une horde de touristes français en famille. L'attrape-touriste, toé chose (lire ma tirade sur le tourisme dans mon dernier blog). Et voilà que commence l'animation de pirate, et ils se mettent à faire danser tout le monde sur le bateau. Pour vous donner une idée, je suis pas mal le seul de mon âge, le plus proche étant un ado frustré assis dans un coin qui aurait tout donné pour être ailleurs...
Et soudain, ça me frappe.
Je suis snob.
Bon, ça ne m'a pas frappé aussi brusquement, c'était déjà en réflexion, mais ce moment me l'a confirmé. Pourquoi, dans ces situations, j'en viens tout de suite à la conclusion qu'on me prend pour un con, et me braque derrière mon fameux "non-mais-moi-je-ne-suis-pas-un-touriste-comme-les-autres"? Parce que je commence à devenir snob, voilà, et j'essaie de me dire que je suis mieux que cette bande de touriste français et que je n'embarquerai pas dans leur jeu de pirate... Alors je me donne deux-trois taloches dans la face, retombe sur terre, et me dit que le voyage va être long si je regarde le monde de haut, et que c'est pas mal plus drôle quand tu te mets à danser avec les pirates....
Ce que je fis...
On reviendra sur mes réflexions sur le tourisme. Je continue d'avoir un complexe face à des formes de tourisme résolument néfastes et dégradantes. Mais je ne vais pas tout mettre dans le même panier.
Le soir, je visite les fameux soukhs de Houmt Soukh, sur l'île, et me fait arnaquer quelques fois pour des bébelles. Je vais devoir travailler sur mon "non, j'en veux pas de tes cocins", parce qu'il n'est résolument pas encore au point. Les gens sont vraiment gentils et accueillants, mais j'en ai un peu ras-le-bol (pour utiliser une expression politiquement correcte) de ne jamais savoir si la gentillesse est véritable, ou si on ne va pas essayer de me vendre un cocin dans le détour. En même temps, je ne peux pas vraiment en vouloir à tout le monde. Le tourisme va tellement mal en ce moment que c'en est triste. Alors quand il y a quelqu'un qui a l'air d'avoir quelques sous, on essaie vite de le dépouiller. Et moi, avec mes cheveux blonds (ne posez pas de question, pour eux, je suis blond) et mon teint pâle, j'ai l'air d'une banque sur deux pattes, même avec mes jeans troués.
Le soir, j'ai réalisé que j'étais le seul touriste de Houmt Soukh. Tous ceux que j'avais vu dans la journée étaient allés se cacher dans les hôtels 5 étoiles de la zone touristique. Ou presque...
Le lendemain matin, j'ai réalisé qu'il y avait trois Québecois dans la même auberge. "Vous êtes en relâche? Non. En grève." Bon... Pour calmer les MESRQ en panne de scandale, sachez que ceux qui partent en voyage pendant la grève sont souvent ceux qui ont voté contre. Your argument is invalid...
Ils veulent m'accompagner quand je leur parle de mes plans de faire le tour de l'île en vélo. Pourquoi pas! On fini par trouver une location de vélo sans arnaque, et on décolle. Bon, les vélos ne valent pas chers, mais au moins ils roulent.... Jusqu'à ce que ma pédale décroche. Mes plans de vélos qui me rendaient si enthousiastes sont un peu à l'eau, on essaie de réinstaller la pédale qui se re-décroche aussitôt. On retourne sur nos pas, moi en mode trottinette sur mon vélo. On s'obstine avec le gérant, qui nous accuse d'avoir brisé sa ferraille, on sort un peu de nos gonds... Et on fini par aller s'écraser sur la plage.
On s'est repris sur la soirée, où on s'est fait inviter à aller prendre le dîner dans une famille du quartier, et où on a passé la soirée à jouer de la musique. Des gens magnifiques et authentiques.
Les maisons troglodytiques de Matmata |
J'arrive dans un hôtel bon marché, au fond d'une grotte, avec mon backpack et ma guitare. J'avais quelques légumes, et ils m'ont trouvé drôle de débarquer dans la cuisine en demandant si je pouvais préparer mon repas... C'est comme ça que ça marche dans les auberges jeunesses, mais pas dans les hôtels. Ils m'ont laissé préparer mon Touski en me donnant tout ce que j'avais besoin. Bonne façon de briser la glace et commencer à jaser avec les employés! Le soir, je découvris que j'étais le seul client. J'avais 6 employés pour moi seul. Ça faisait un peu pitié.
La sainte paix à Matmata |
À la gare de Gabès avec mon vieux philosophe |
À ce sujet, je n'ai jamais été aussi ouvert sur le conflit israélo-palestinien et toute la dynamique de cette région. Et c'est un sujet qui n'en fini plus de s'étendre.
J'ai à peine effleuré le sujet de la démocratie dans mon dernier blog. C'est que le sujet politique est tellement vaste que j'ai peur de tout bâcler en n'abordant q'une partie. Le vieil homme me disait "On ne méritait pas la liberté. On n'est pas prêt. On ne sait pas quoi en faire. On croit que la liberté, c'est de se soûler dans la rue et de faire n'importe quoi. La liberté, ça vient avec l'individualisme et le chacun pour soi. On ne comprend pas la liberté. La dictature est mieux pour nous. Comme Bourguiba. C'était un dictateur, mais qui aidait le peuple". Je le désapprouvai poliment. On ne peut pas vouloir un bon dictateur mais refuser la capacité de le choisir. La démocratie est un jeu dangereux, vrai. Il nécessite de l'éducation. Une bonne éducation, et accessible à tous... Et vous savez, c'est pareil pour nous. Même notre démocratie est en danger si on refuse de conserver une éducation accessible...
La démocratie, c'est aussi de donner la parole à tous. Et après des années de dictature qui a fortement écrasé les radicaux extrémistes conservateurs, il est normal de les voir réapparaître dans le décor une fois gagnée la liberté d'expression. Il ont même tenté de s'approprier la révolution, alors que c'était une révolution résolument sociale et non religieuse.
Maintenant, certains disent qu'ils se sentaient plus libres sous la dictature. Ils se sentaient plus en sécurité. Il n'y avait pas les braquages, ils n'avaient pas peur de sortir le soir. Et ils n'avaient pas peur de voir les droits de la femme répudiés par des radicaux au pouvoir. Triste ironie. Maintenant, je vois trop de gens perdre espoir, après un an à peine, après tout le chemin qui avait été fait, devant la réalité du jeu démocratique. Beaucoup de jeunes déçus. Eux qui ont fait "dégager" tant de traîtres. J'aurais peur de voir la Tunisie perdre espoir, parce que le monde entier a vu naître un espoir en Tunisie, ce fameux 14 janvier. Et je ne peux pas vraiment leur donner le Canada comme exemple de démocratie fonctionnelle...On a encore du chemin à faire...ou à regagner!
Pour vous dire toute la vérité sur la Tunisie, j'ai remarqué encore des relents de sexisme qui me déplaisent beaucoup. Pas le sexisme des femmes opprimées, réduites... Juste une sorte de machisme structurel, de société masculine, de division de rôles, les cafés pour hommes, etc. Malgré que la Tunisie soit extrêmement avancée en terme de droits des femmes, ça n'a pas manqué de me frapper.
Autre chose qui me déplaît, c'est le fait que je ne parle pas Arabe. Je fais des efforts, je vous promets. Mais c'est plus difficile que l'Espagnol. Et ça me laisse cette impression que je ne peux pas me baigner totalement de la Tunisie, qu'une partie m'est encore inaccessible, quand je ne peux pas prendre part à toutes les discussions. J'ai appris une chanson en Arabe. Je vous la chanterai à mon retour.
Mon sac sur le dos, je me demande, quelle est la différence entre du backpack et du simple tourisme? Peut-être simplement le type de bagage utilisé? On a parfois l'image du backpacker qui parcoure le monde à pied. Et moi, qui prend des bus, des trains et des avions, ne suis-je que touriste déguisé? Bon, backpacker, c'est plus que la marche. C'est se permettre de changer de plans à la dernière minute, suivre un itinéraire personnel, voyager léger pour être prêt à n'importe quoi, prendre le temps de s'arrêter, se mêler à la foule, avoir des standards de confort largement diminués. Favoriser les transports de nuits parce que ça permet d'économiser sur l'hébergement!
Et étrangement, j'apprécie beaucoup trop ma solitude présentement! Être seul me permet d'entrer tellement plus facilement en contact! Mais si les décisions sont plus faciles sans avoir à faire de compromis, ça devient aussi moins "challengeant", moins drôle. C'est peut-être parfois trop facile, quand on n'a que soi à convaincre?
Bon. Tabarka m'attends!
Sbalakhir!
P.S. Désolé pour le français Marie-Pier, je n'ai pas toujours le temps de me relire!
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